Situation budgétaire de la France

Par

Mathieu Plane

Après quatre ans de crise, la situation budgétaire de la France s’est nettement dégradée. Le déficit public des administrations publiques s’est creusé de plus de 3 points de PIB (de 2,4 % du PIB en 2019 à 5,5 % en 2023) et la dette publique a augmenté de 11,8 points de PIB (passant de 98,1 % du PIB en 2019 à 109,9 % en 2023). Si les crises successives (sanitaires et énergétiques) expliquent une part significative de la dégradation des finances publiques1. une part non négligeable est liée à la dégradation du solde public structurel, en raison notamment de la mise en place de mesures fiscales non financées ou du renoncement à certains hausses de prélèvements (chiffrées à 40 milliards d’euros, dont un peu plus de la moitié est un réponse à la crise des gilets jaunes, voir les crises…).

1 Entre environ la moitié et les deux tiers selon nos calculs. voir M.Plane, X.Ragot et R.Sampognaro (2024) « Les crises expliquent-elles la hausse de la dette publiques en France ? », blog de l’OFCE, 24 mai 2024)

Après la dégradation de AA à AA- de la note sur la dette publique de la France le 31 mai 2024 pas S&P et l’ouverture par l’Union Européenne d’une procédure pour déficit excessif contre la France le 19 juin 2024, les finances publiques de la France sont sous pression et la trajectoire budgétaire attendu de la France particulièrement scrutée par nos partenaires européens comme par les marchés.

Le déficit public de la France représente 5,5 % du PIB en 2023, dont 1,8 point lié à la charge d’intérêt. Les mesures budgétaires exceptionnelles pour répondre aux crises, ainsi que la part financée par le plan de relance européen, qui vont s’éteindre progressivement, représentaient encore 1,2 points de PIB en 2023. Ainsi, le déficit primaire hors mesures temporaires représentait 2,5 points de PIB. Au regard de la variation des outputgap entre 2019 et 2023, nous considérons que sur ces 2,5 points de PIB, 0,7 point sont conjoncturels. Ainsi le déficit structurel primaire serait de 1,8 point, soit l’équivalent de 50 milliards d’euros. Réduire ce déficit structurel sur quatre ans nécessite un effort de l’ordre de 0,5 point de PIB par an (14 milliards par an), en adéquation avec la procédure européenne. Par ailleurs, selon le rapport Pisani-Ferry Mahfouz, le besoin de financement supplémentaire à 2030 pour la transition énergétique pour répondre à nos engagements climatiques représenterait 67 milliards d’euros par an, dont 34 milliards pour la partie financement public (1,2 point de PIB).

La crédibilité budgétaire des programmes dans un cadre européen passe par la nécessité de dégager de nouvelles recettes fiscales ou des économies pour réduire le déficit structurel et répondre dans le même temps aux besoins de financements nouveaux pour la transition énergétique. Une autre voie par la dette est possible, et peut-être souhaitable, mais cela posera d’une part la question des conséquences du non-respect des règles budgétaires européennes et d’autre part du crédit accordé par les investisseurs et épargnants au futur gouvernement sur ses capacités à faire des choix budgétaires alternatifs compatibles avec une dette soutenable.