Hausse de 10 % de l’indice Fonction Publique

Par

François Geerolf

Mathieu Plane

Depuis 2000, l’indice fonction publique a augmenté bien moins rapidement que les prix (tableau 1). La baisse de la valeur réelle de l’Indice Brut de la fonction publique sur 23 ans est de 15% (19% pour l’indice net, car les cotisations salariales pour les retraites ont augmenté depuis la réforme de 2010) et elle est particulièrement marquée depuis 2017, avec une baisse de 8 % en six ans, et ce malgré la revalorisation de l’indice de 5.1 % entre le 2ème trimestre 2022 et le 3ème trimestre 20231. Des mesures catégorielles plus favorables aux catégories C qu’aux catégories A font que la baisse réelle de l’indice est un peu moins marquée chez les fonctionnaires de catégorie C (-11 % depuis 2000) que chez ceux de catégorie A (-18 %). En revanche, la dynamique du salaire moyen par tête (SMPT) réel des services non marchands est très différente, avec une hausse de 15,4 % depuis 2000. Cet écart entre l’évolution du salaire et l’indice s’explique en partie par le Glissement-Vieillesse-Technicité (GVT) lié à la fois aux promotions au sein des grilles, aux évolutions à l’ancienneté sur les grilles, aux avancements liés à des concours internes ou l’acquisition d’une technicité. Cet effet sur les salaires peut, de plus, être complété par des primes et des mesures sectorielles de revalorisations salariales, comme dans la santé depuis 2020 (Ségur de la Santé depuis) ou l’éducation nationale depuis 2023. Ainsi, sur la période 2000-2023, la hausse réelle des salaires des service non marchands est quasiment identique à celle des branches marchandes (+16 %) et l’écart entre la dynamique salariale du secteur marchand et celle du non marchand s’est particulièrement réduit depuis 2019. Cependant, la structure des qualifications et des diplômes – et sa dynamique – n’est pas la même dans le secteur privé que dans le secteur public. Par ailleurs, la structure par âge n’est pas non plus la même, avec une pyramide des âges très différente dans le public que dans le privé (non remplacement, recrutement de contractuels).

1 On utilise l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) pour calculer la valeur réelle du point d’indice, car c’est la référence en France pour l’indexation des salaires et les négociations salariales. On peut aussi utiliser l’Indice des Prix à la Consommation Harmonisé (IPCH), publié par Eurostat et harmonisé au niveau européen. En optant pour l’IPCH au lieu de l’IPC, la diminution de la valeur réelle de l’Indice Brut se révèle être de 18.6% pour l’Indice Brut et de 22.8% pour l’Indice Net, depuis 2000 (utiliser les onglets du tableau 1).

Tableau 1. Indice réel de la fonction publique et salaire réel du secteur marchand et non marchand, en utilisant l’indice Brut vs. Net, et l’inflation IPC vs IPCH.

Au total, il s’avère complexe de comparer l’évolution des rémunérations entre le secteur public et le secteur privé. La réalité se situe quelque part entre la progression du point d’indice et l’augmentation moyenne des salaires dans la fonction publique, qui inclut des effets de structure importants. De plus, la nette réduction de l’indice par rapport à l’inflation peut compromettre l’attrait de certaines carrières dans le secteur public, entraînant un pouvoir d’achat considérablement plus faible au début de carrière qu’il y a vingt ans, particulièrement pour les métiers où les primes constituent une part minime de la rémunération.

La masse salariale (hors cotisations sociales et contributions aux régimes de retraite) versée par les administrations publiques représente 234 milliards d’euros en 2023 (8,3 % du PIB). Elle est répartie à hauteur de 32 % pour l’Etat, 10 % pour les opérateurs d’administration centrale, 31 % pour les collectivités locales et 27 % pour les administrations de sécurité sociale. Une hausse de 10 % de l’indice fonction publique coûterait ainsi aux finances publiques environ 23 milliards d’euros (0,8 points de PIB), dont 7 milliards pour les collectivités locales que l’Etat devrait compenser par une hausse des dotations. Faisons un petit calcul simple : avec une propension à épargner de 17 % et un contenu en importations dans la consommation finale de 19 % selon l’Insee, l’effet attendu sur le PIB serait de l’ordre de 16 milliards, ce qui permettrait d’améliorer à court terme la croissance du PIB de 0,6 point. Le coût budgétaire ex post de la mesure serait de 0,5 point de PIB (contre 0,8 point de PIB ex ante).